À quel moment de notre histoire la course à pied antique est-elle devenue le footing, pratiqué aujourd’hui par tant de personnes ?

Des grecs aux hippies, histoire du footing

05/12/2024 19:43

À quel moment de notre histoire moderne la course à pied antique est-elle devenue le footing, pratiqué aujourd’hui par plus d’un demi-milliard de personnes sur Terre (plus de 12 millions en France) ? Jetons un coup d’œil dans le rétro. Ou plutôt derrière l’épaule.

La légende de Philippides, ce messager grec qui aurait parcouru 40 km en courant pour annoncer la victoire des grecs contre les perses à ses princes, est parvenue jusqu’à nous. Le récit est toutefois contredit par de nombreux historiens et reste sans doute un mythe. Ce qui ne relève pas de l’ordre du mythe, c’est que la course à pied avait déjà sa place dans l’antiquité. Elle était à priori pratiquée en Égypte, en Asie, en Irlande ou encore en Grèce, notamment lors de fêtes religieuses. Rendre hommage aux Dieux à travers le culte du corps. Selon certaines sources, Pythagore lui-même aurait ainsi été un athlète reconnu en plus d’être un homme de savoir. La pratique sportive fut ensuite bannie par l’Église catholique, peu encline au développement et au bien-être du corps comme c’était le cas chez les grecs.

La figure du coureur va bien réapparaître au 19ème siècle chez les aristocrates anglo-saxons, mais toujours pas de trace de course à pied dans les milieux plus populaires… L’essor de l’olympisme au XXème et le développement des médias (journaux, puis TV) ont sans doute participé à la diffusion de l’image du coureur dans les sociétés occidentales. Mais dans les années 50, seuls les athlètes et les militaires courent toujours. En France, l’avènement d’un sportif comme Alain Mimoun n’a pas suffit à faire courir le peuple.

Puis vinrent les hippies…

À la fin des années 60, il se trame pourtant quelque chose de l’autre côté de l’Atlantique. Des jeunes dévergondés, femmes et hommes, courent dans les parcs ou les villes, sous le regard étonné des passants. Il est encore possible de trouver des coupures de presse qui relèvent d’incidents incluant des “runners”, qualifiés de “weirdos” (personnes étranges), un peu partout aux États-Unis. Dans le documentaire « Free to run » du suisse Pierre Morath, qui revient sur cette période pionnière, on peut trouver des témoignages de coureurs préférant courir la nuit pour être tranquilles face au regard d’autrui. Mais alors que s’est-il passé pour que ce phénomène apparaisse aux États-Unis ?

L’Histoire avec un grand H est toujours une somme d’événements plus ou moins fortuits. Ainsi, en 1962, au cours d’un voyage en Nouvelle-Zélande, Bill Bowerman, futur fondateur de Nike (1968), fait la découverte des méthodes de l’entraîneur Arthur Lydiard, qui a développé un programme pour les coureurs de cross-country. Inspiré ou visionnaire, l’américain rentre chez lui et publie en 1967 l’ouvrage « Jogging : a physical fitness program for all ages » (Jogging : un programme de remise en forme physique pour tout âge). Le livre est un best-seller, la popularité de la pratique ne cesse plus d’augmenter. La victoire de l’américain Frank Shorter au marathon des Jeux olympiques de 1972 à Munich et le phénomène Steve Prefontaine (photo d’illustration), toujours considéré comme un des plus grands coureurs de fond américains, ont achevé la popularisation de la course à pied à cette période.

L’avènement

Les tabous concernant le sport féminin étant encore prégnants, nourris par le pouvoir religieux et celui du patriarcat, ils vont aussi tomber avec le running. Dans la foulée de la première féminine à participer officiellement à un marathon en 1967 (Boston), Kathrine Switzer, les femmes se mettent à courir, au grand dam des “coincés”. Liberté du corps et de l’âme, le running va si bien avec les années 70. Olivier Bessy, sociologue du sport et auteur de l’ouvrage « Courir de 1968 à nos jours » précise cette pensée dans la France post-Mai 68 : « L’imaginaire associé aux courses d’endurance est saturé par le caractère dur, austère et ascétique de ces pratiques, en lien avec l’histoire militaire de la discipline. La course à pied s’émancipe de son carcan compétitif, sous l’impulsion de nouveaux acteurs et de nouveaux entrants, moins compétiteurs et plus pratiquants de loisirs, qui inventent de nouvelles façons de courir ». La course à pied est devenue un phénomène sociétal. On court pour la performance, mais aussi désormais pour les sensations, le partage, la résonance avec la nature…

histoire footing

Cette nouvelle façon de courir, qui représente une fête, le Marathon de New-York, né en 1970, va l’incarner à merveille. Initialement une course modeste se déroulant à Central Park, la course prend une ampleur populaire monumentale en 1976, sous l’impulsion du visionnaire Fred Lebow, quand son parcours s’étendra sur tous les quartiers de « Big Apple ». Dans les années 80, l’explosion du nombre de courses un peu partout dans le monde va définitivement faire entrer la course à pied dans la culture populaire de masse. En Europe, le magazine Spiridon (référence au premier vainqueur du Marathon, Spyrídon Loúis), lancé en 1972 par Noël Tamini et Yves Jeannotat, va participer à la démocratisation de la course à pied, dans le même esprit libertaire que celui des pionniers américains.

Le slogan du magazine ? « Courez tous avec nous« . On peut dire que le message est passé…

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